Comment raconter une telle aventure sans être trop long et ennuyeux ? Impossible de relater jour après jour ce que j’ai vécu durant cette traversée qui s’est déroulée sur 19 jours. Alors j’ai fais le choix de sélectionner quelques extraits de ce périple, quelques fragments en espérant vous donner envie de réaliser ce genre de voyage.
Toutes les photos de la HRP:
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Partir seul en marchant et en courant de refuge en refuge, entre Hendaye et Banyuls par la HRP, empruntant parfois GR10 et GR11, parfois hors sentier, traversant la France, l’Espagne et l’Andorre, en 18 jours, relier l’Atlantique à la Méditerranée en traversant la plus longue chaîne montagneuse Française. Voilà le programme que je m’étais fixé.
L’idée de traverser un massif montagneux m’a toujours attiré car il symbolise un voyage maximum, un parcours logique reliant 2 points extrêmes, permettant de découvrir une immense variété de paysages. Après avoir traverser les Alpes par le GR5 en 2011, puis la Corse par le GR20 au mois de mai dernier, je tenais à m’attaquer aux roi des massifs : les Pyrénées.
Ayant préparé mon parcours et mes étapes durant de long mois sans savoir exactement si j’allais me lancer dans l’aventure, j’ai finalement pris la décision mi-juillet de réaliser cette traversée en aout. Cette préparation n’a pas été simple car je disposais de peu d’information sur la difficulté du terrain. Le guide de la HRP rédigé par Georges Véron a été mon fil conducteur. L’exercice difficile étant de transformer les 42 étapes initiales en seulement 18 et en trouvant un hébergement chaque soir me proposant repas et repos (et bière si possible). Ces 18 étapes devaient être équilibrées en kilométrage et en dénivelé. Exercice difficile que j’ai presque réussi à faire. La seule adaptation que j’ai dut pratiquer concerne la 12ème étape qui m’a semblé impossible à effectuer en une journée vu la difficulté du terrain rencontré les jours avant. Ayant prévu un jour de repos le 10ème jour, j’ai décidé de transformer ce repos en 11ème étape et découper la 12ème en 2. Je ne regrette pas d’avoir fait ainsi.
Certains se lancent dans cette traversée en faisant le choix de partir avec tente, réchaud et nourriture afin d’être indépendant des lieux de repos. Ce n’est pas mon cas car je voulais me déplacer le plus rapidement possible avec un poids minimum. Mon sac pesait toutefois 10 kg, ce qui rend la course difficile.
La HRP est un concept. Il n’y a pas réellement d’itinéraire défini, ni de sentier balisé le parcourant. Elle offre une multitude de variantes et d’adaptations possibles permettant de privilégier les passages que l’on souhaite. L’idée de la HRP est d’effectuer cette traversée la plus directe possible, en longeant les crêtes frontières, souvent en haute montagne. Elle s’étend sur environ 750km pour 45000m de dénivelé. La navigation est un point clef. Cartes, boussole et GPS m’ont été d’un grand secours. Ne souhaitant pas porter 2kg de cartes, j’avais imprimé des extraits correspondant à mon parcours de chaque jour. Si la qualité globale de ces cartes était suffisante, elle était loin d’être optimale, surtout en Espagne. Alors il fallait régulièrement sortir le GPS afin de vérifier si j’étais bien sur la trace. Parfois, presque chaque jour, il m’arrivait de me tromper de direction et de m’en rendre compte plus ou moins rapidement, ajoutant stress, kilomètres et dénivelés. La pire erreur est survenue le 2ème jour dans le pays Basque recouvert de nuages, n’y voyant rien. Alors que je devais quitter le sentier au passage d’un col et couper à travers les arbustes et fougères, j’ai obliqué trop tôt et trop à l’Est et sans m’en rendre compte, je suis revenu sur mes pas, en direction du point de départ. Après vérifications, j’ai compris mon erreur mais j’ai perdu 2 bonnes heures dans l’opération. Il est facile de s’égarer dans les Pyrénées quand elles sont recouvertes de nuages ou brouillard.
Chaque jour je me levais entre 5h et 5h30, prenait un petit-dej lorsque cela était possible puis partait aux alentours de 6h. Au préalable je prenais soin de préparer mes pieds afin d’éviter ampoules et échauffements. Ca a bien fonctionné car je n’ai eu aucune ampoule ni aucune tendinite. Les seules blessures subies ont été provoquées par quelques chutes sur des blocs glissants, mais rien de grave. Les journées se déroulaient toutes sur le même principe, sans pause sauf pour prendre quelques photos et le casse-croute de midi. J’estimais et vérifiais mes temps de passage en vérifiant l’heure probable d’arrivée au refuge, car beaucoup d’entre eux imposent une arrivée avant 19h pour pouvoir profiter du repas. J’ai toujours réussi à rallier le refuge à temps, même si mon arrivée la plus tardive s’est effectuée à 19h30 après plus de 13 heures de crapahut.
La variété et la beauté des paysages m’ont surpris. Chaque journée proposait des paysages différents, tantôt verdoyant, granitique, calcaire, schisteux, aride, mais toujours splendide et sauvage.
J’ai put admirer énormément d’animaux sauvages: isards, vautours, aigles, mouflons, marmottes. J’ai eu la chance de voir des empreintes de l’ours Eréné, dernier survivant dans la vallée d’Asp, de contempler des levers de soleil somptueux, des lacs de montagne étincelants, des couchers de soleil irradiant les montagnes, des cascades et torrents impétueux, des paysages vertigineux, des panoramas grandioses, des fleurs magnifiques.
J’ai fait de belles rencontres avec des randonneurs, des bergers, chasseurs ou gardiens de refuge. Comme par exemple Thierry lors de mon avant dernière étape, amputé fémoral, il réalisait la traversée par le GR10 depuis le mois de mai. La bergère du Cap de Pount qui faisait son fromage de brebis et qui m’en a fait partagé, qui m’a offert du caillé frais avec un peu de sucre, succulent. Le chasseur qui cherchait ses chiens depuis 3 jours à qui j’ai donné 2 piles lui permettant enfin de les localiser avec son récepteur. Le couple de bergers de la Pierre St Martin. Le traileur rencontré miraculeusement alors que je n’avais vu personne depuis 6h et que je venais de me tromper de direction, il m’a remis sur le bon chemin et avons échangés sur notre passion pour la montagne. Le cueilleur de champignons qui m’a appris à reconnaitre le bon cèpe du faux. Ce berger venu soigner ses brebis dans la montagne, qui m’a raconté son métier et la rudesse de la montagne. Le randonneur rencontré à mi-parcours qui faisait la traversée en 20 jours dans le sens inverse. Le gardien du refuge de Mariailles qui nous avait préparé pour l’apéro un délicieux carpacio de cèpes.
Au final je m’estime très chanceux d’avoir put réaliser ce voyage, dans de bonnes conditions météo, en évitant blessures et arrivées hors délai. J’ai put respecter ma feuille de route. J’ai toujours rencontré la bonne personne au bon moment. Tout s’est déroulé idéalement, souvent complexe et difficile physiquement, mais un tel voyage le mérite.